Cette semaine, nous nous plongeons dans les fragments, les images poétiques, les sensations et les mots qui nous amènent, synesthésiquement, à l’atmosphère froide et septique des centres de soins. La température glaciale, la tonalité mélancolique des moments où nous nous retrouvons démunis face à la douleur, à l’inconfort, à l’imminence constante de la mort qui rôde comme un chien sauvage sur sa proie. Le mélange des odeurs et l’absence monochrome de couleurs. Tout doit être stérilisé, mais les mesures d’hygiène ne distinguent pas les bactéries de l’espoir, et tout finit par être exterminé ensemble.Et qui s’occupe de qui s’occupe des malades ? Qui accompagne le soignant ? Qu’en est-il de ceux qui attendent la guérison d’autres personnes dans une attente angoissante ? Qui prend soin de ceux qui prennent soin ? Un pour tous et chacun pour soi ?
La poésie de Masha déboule du sas au temps arrêté qu’est la salle d’attente des urgences (in)hospitalières qu’on fréquente parfois sur base régulière quand on souffre de maladie chronique, On y reste plus ou moins longtemps en fonction de la gravité de son affection. On peut donc y avoir ses habitudes et repères. On peut être plié à son rituel, en connaître les recoins, y déployer des stratégies pour accélérer le temps, pour être entendu et soigné plus efficacement. Masha en pousse les portes battantes pour nous parler de ce qui se passe une fois franchie cette salle des pas perdus.
Le deuxième texte montre l’éventail de styles de notre camarade grognon. Peggy déplace l’acidité et l’humour et les transforme en un fine coupe au scalpel, presque dramatique, de son récit. La lame coupe petit à petit, au fur et à mesure qu’elle construit chaque personnage à partir de son observation presque documentaire. Elle découpe le temps de l’attente, solitaire et corrosif. Impossible de ne pas s’identifier à l’état d’anesthésie qu’une personne doit développer pour attendre la guérison d’un proche dans les couloirs d’un hôpital. C’est une immersion avec des doses d’exemption, si on s’immerge trop on tombe malade avec le patient, si on s’exempte trop on finit par partir. Le jeu de l’exemption et de l’immersion est l’exercice le plus courant dans les salles d’attente et le prix demandé pour cet exercice est élevé.
Nous vous souhaitons une bonne lecture.